En 1982, la danseuse Anne Teresa De Keersmaeker, alors âgée de 22 ans, crée Fase. Un moment de danse exceptionnel qui fait l’effet d’une déflagration. Voir ce spectacle est de ces expériences marquantes dont on se souvient toute la vie.

Elles sont deux sur la scène, vêtues d’une robe légère et fluide qui épouse les mouvements de leurs corps. Aux pieds, des chaussures blanches. Bras nus, jambes nues, elles n’ont pour décor qu’un mur blanc où, par un jeu de lumières, apparaissent et disparaissent leurs ombres. Elles sont deux interprètes magnifiques qui, dès les premières notes de la partition, tournent sur elles-mêmes, déploient les mains, lèvent les bras, oscillent de quart, de moitié, parfaitement accordées, totalement synchrones. La musique de Steve Reich, Four Movements to the Music, est répétitive. Elle forme des boucles étourdissantes qui s’enchaînent jusqu’au vertige. C’est sur ce rythme fou, hypnotique, que les deux danseuses, côte à côte sur le plateau, entrent dans un temps de danse dont la pureté, l’engagement et l’énergie laissent bouche bée. L’expérience est fascinante. Les interprètes reproduisent les mêmes gestes avec une précision stupéfiante : elles tournent, sautent, balancent les bras. Cette chorégraphie a fait date dans l’histoire de la danse. Intemporelle, inoubliable. La découvrir, c’est avoir envie de la revoir dès le lendemain.